Выписки на ходу
Oct. 26th, 2013 04:07 pm![[personal profile]](https://www.dreamwidth.org/img/silk/identity/user.png)
Agnès Desarthe, Comment j'ai appris à lire
p. 57 "En classe de sixième, nous étudions Jacques Prévert. (...) Je lis Prévert du matin au soir, comme j'écoute Bach, comme je lirai plus tard Rimbaud, Apollinaire, Baudelaire, Racine. Je crains plus que tout l'ordinaire, et voilà justement que la poésie ne l'est pas. La rime ne finit pas de m'enivrer.C'est comme un tour de magie, un anneau invisible par lequel la phrase passe et se renouvelle. Il y a le sens, et il y a autre chose: la beauté insensée, si désordonnée sous sa contrainte apparente. La beauté musicale du vers, la rigueur qu'elle exige et qui, sans cesse, entre en collision avec la fonction informative de la langue, la met en péril, l'empêcha, la court-circuite. Je retrouve le plaisir des rengaines infiniment énigmatiques de Boby Lapointe.
J'ignore, à l'époque, qu'il existe d'impitoyables hiérarchies en art, que al chanson est un genre mineur, que Jacques Prévert est considéré par nombre de gens sérieux comme un poète pour enfants, légèrement démagogue, un ringard. Que n'ai-je pas entendu sur son compte? Que c'est facile, que ça plaît. Mais la plupart du temps, il n'est même pas évoqué comme poète, plutôt comme dialoguiste de cinéma. Là, d'accord, u auteur populaire pour un art populaire; aucun nez ne se fronce, aucun sourire ne passe de l'attendrissement à la condescendance.
C'est à peine si j'ose en parler. Comme si j'avouais lire Nous deux ou Intimité."
Всё правда: и про Превера в частности, но особенно про французский интеллектуальный снобизм, который, когда чистого разлива, нашему российскому (который я ставлю высоко в рейтинге) сто очков вперёд даст. Но продолжим:
"Mais j'anticipe. À dix ans, je suis tout entière à la joie de son compagnonnage. J'ai un nouvel ami, plus âgé, plus expérimenté, plus intelligent que moi, et pourtant un double. Tout c
e qu'il dit, je le pense. Tout ce à quoi je pense, il l'écrit. Je n'aime pas lire, je ne sais pas lire, et j'éprouve néanmoins le plus délicieux, le plus fort des sentiments qui puisse unir le lecteur à l'écrivain, et que Virginia Woolf évoque en parlant de lecteur "complice", de lecteur "collaborateur".
И дальше:
"Cela fait bien longtemps que je n'ai pas rouvert un volume de mon poète lauréat de l'année 1976. J'ignore l'effet que cela me ferait aujourd'hui. Je remarque la difficulté, proche de la gêne, que je ressens à parler de lui, comme d'un engouement de jeunesse pas très glorieux, avouer que l'on a été amoureuse de Dave ou de Sacha Distel. Qu'on le veuille ou non, il y a un aspect social, voire mondain de littérature."
Дальше она приводит примеры из жизни, но и так ясно. И тоже всё верно. Хуже, чем признаться в любви к Преверу - признаться в любви к Сент-Экзюпери или симпатии Морису Карему. Признание в любви к Виану тоже часто может быть воспринято как социальный или светский промах. Поэтому когда мой и без того любимый Сфар "заново" рисует "Маленьхкого принца" в формате BD, мой и без того любимый Гондри снимает "Пену дней", я люблю их ещё больше.
p. 57 "En classe de sixième, nous étudions Jacques Prévert. (...) Je lis Prévert du matin au soir, comme j'écoute Bach, comme je lirai plus tard Rimbaud, Apollinaire, Baudelaire, Racine. Je crains plus que tout l'ordinaire, et voilà justement que la poésie ne l'est pas. La rime ne finit pas de m'enivrer.C'est comme un tour de magie, un anneau invisible par lequel la phrase passe et se renouvelle. Il y a le sens, et il y a autre chose: la beauté insensée, si désordonnée sous sa contrainte apparente. La beauté musicale du vers, la rigueur qu'elle exige et qui, sans cesse, entre en collision avec la fonction informative de la langue, la met en péril, l'empêcha, la court-circuite. Je retrouve le plaisir des rengaines infiniment énigmatiques de Boby Lapointe.
J'ignore, à l'époque, qu'il existe d'impitoyables hiérarchies en art, que al chanson est un genre mineur, que Jacques Prévert est considéré par nombre de gens sérieux comme un poète pour enfants, légèrement démagogue, un ringard. Que n'ai-je pas entendu sur son compte? Que c'est facile, que ça plaît. Mais la plupart du temps, il n'est même pas évoqué comme poète, plutôt comme dialoguiste de cinéma. Là, d'accord, u auteur populaire pour un art populaire; aucun nez ne se fronce, aucun sourire ne passe de l'attendrissement à la condescendance.
C'est à peine si j'ose en parler. Comme si j'avouais lire Nous deux ou Intimité."
Всё правда: и про Превера в частности, но особенно про французский интеллектуальный снобизм, который, когда чистого разлива, нашему российскому (который я ставлю высоко в рейтинге) сто очков вперёд даст. Но продолжим:
"Mais j'anticipe. À dix ans, je suis tout entière à la joie de son compagnonnage. J'ai un nouvel ami, plus âgé, plus expérimenté, plus intelligent que moi, et pourtant un double. Tout c
e qu'il dit, je le pense. Tout ce à quoi je pense, il l'écrit. Je n'aime pas lire, je ne sais pas lire, et j'éprouve néanmoins le plus délicieux, le plus fort des sentiments qui puisse unir le lecteur à l'écrivain, et que Virginia Woolf évoque en parlant de lecteur "complice", de lecteur "collaborateur".
И дальше:
"Cela fait bien longtemps que je n'ai pas rouvert un volume de mon poète lauréat de l'année 1976. J'ignore l'effet que cela me ferait aujourd'hui. Je remarque la difficulté, proche de la gêne, que je ressens à parler de lui, comme d'un engouement de jeunesse pas très glorieux, avouer que l'on a été amoureuse de Dave ou de Sacha Distel. Qu'on le veuille ou non, il y a un aspect social, voire mondain de littérature."
Дальше она приводит примеры из жизни, но и так ясно. И тоже всё верно. Хуже, чем признаться в любви к Преверу - признаться в любви к Сент-Экзюпери или симпатии Морису Карему. Признание в любви к Виану тоже часто может быть воспринято как социальный или светский промах. Поэтому когда мой и без того любимый Сфар "заново" рисует "Маленьхкого принца" в формате BD, мой и без того любимый Гондри снимает "Пену дней", я люблю их ещё больше.